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Porte sur le toit
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11 juillet 2009

histoire du passé

On voudrait vraiment enjamber ce qui s'est fait avec nous, en nous, malgré nous, effacer ce qui s'est écrit avec nous, en nous, malgré nous. Mais d'une ancienne détresse, il n'est pas aisé de se séparer. Comme d'une ancienne maîtresse. S'il s'agissait d'un simple incident, cela serait réglé en trois mot : "c'est du passé". Mais ce qui nous est resté "en travers", "n'est pas bien passé", autant dire "n'est pas passé du tout" est cela qui condamne notre futur. Bien plus que le présent perpétuel d'un passé sans avenir, cela s'appelle le désespoir. La morsure d'un passé qui mord sur l'avenir. Si seulement on pouvait faire le black out, imposer un embargo sur cela qui nous obsède et hypothèque notre existence, rompre tout bonnement et simplement, ce serait fait. Parce que rompre est un fait, c'est même le prototype du fait : quelque chose que l'on veut et que l'on subit, toujours foncièrement les deux ensemble. Vraiment le vouloir ou le vouloir vraiment. Car vouloir est faire ou n'est rien. Et comme le dit le philosophe la volonté est le pouvoir même de pouvoir, autrement dit le pouvoir de faire. Mais vouloir ne se décrète pas ; un mot, un geste ne suffisent pas à donner congé à un passé par trop encombrant. La seule réponse qui vient à l'esprit est de travailler à construire un autre présent, ce qui, on le sait, ne se fait pas en un jour, ni du jour au lendemain. Changer le présent, c'est ce que fait la révolution qui va jusqu'à créer un nouveau calendrier : symbole par excellence de sa "victoire" sur le passé, qui consomme une rupture longuement préparée, résultat d'un "travail", du travail naturel de l'Histoire. La révolution est bien le dernier acte d'un coup de théâtre dont il faut chercher les prémisses loin dans le temps. 1789 se prépare et est en route depuis l'arrivée en Europe de l'or sud américain qui installe le capitalisme avec les premières manufactures. La société change de visage par le travail et le travail de son histoire. Et il faut là encore remonter à loin... Grotius, Pufendorf, précurseurs des Lumières mettent la dernière main au système républicain. Sans ce minutieux programme d'un nouveau régime, la révolution de 89 n'eût été qu'une unième révolte ou Jacquerie qui secouait l'ancien...On ne rompt avec le passé que si l'on a un présent de rechange. Faire la révolution serait alors : en finir avec le cauchemar de l'histoire. Mais il est à se demander si au-delà de son aspect spectaculaire et tenant compte de sa maturation, celle-ci ne serait pas purement et simplement une péripétie. Rupture donc mais dans la continuité, rupture comme summum du continuum. Révolution : rupture après coup d'un grand spectacle qui se prépare discrètement depuis longtemps. Dans la passion amoureuse comme dans l'histoire, la rupture est presque toujours théâtrale, coup de théâtre qui entend fermer le théâtre ou baisser définitivement le rideau. Cependant ce rituel laisse sceptique sur son pouvoir d'inhumer sur ce qu'elle voudrait vraiment enterrer. Ainsi de la folie dionysiaque qui ne rompt jamais vraiment avec la mesure d'Apollon. On le sait, l'histoire nous le montre : la terreur extermine au nom même de la rigueur. C'est à se demander si la révolution qui prétend démolir toutes les traditions n'est pas le moment archi traditionnel de la création.

Pendant des millénaires le temps fut pur sortir, espace sortant. On ne peut pourtant pas nier cette ardeur ou fureur de celui qui voudrait mettre un terme à un passé qu'il s'est représenté comme malheureux, tourmenté, infernal. Tout travail sur le passé qu'il s'appelle analyse ou psychanalyse tente de faire remonter l'individu jusqu'à l'origine, de reconstituer la préhistoire de soi, la protohistoire de chacun ; tout cela qui forme le passif d'une passé interdit : chose souvent indicible et qui fait le lit des secrets de familles. Alors comment rompre ce silence qui pèse comme une chape de plomb sur le passé, comment réactiver ce dont l'enfance n'a pu que pâtir et dont elle a perdu jusqu'au souvenir et dont notre mémoire d'adulte a fait quelque chose de méconnaissable? Comment rompre avec cela qui plus rien de mémorable sauf à interroger l'extravagance des rêves qui en sont les vestiges ou reliques, fragments ou débris...Comment donc rompre avec un passé s'il n'a jamais été aucun présent?

à suivre...

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