Je voudrais entrevoir l'étrange aspérité de ce
Je voudrais entrevoir l'étrange aspérité de ce monde soustrait à notre regard. Sans toi le monde se décolore à grande vitesse, par la rapidité avec laquelle elle s'éloigne de la circonstance qui lui avait conféré semblant de justification. Maintenant elle a le visage net de passé, embrumée de futur dans l'ouvrage de nos paresses conjuguées. Nous osons aller si loin que la parole débordée, dans son emportement, court le risque d'aller droit à son extinction. Je t'aime dit l'inouï et supplante nos actes. Nous croyons être parvenus à ce rivage du trompe l'ouïe, là où plus rien ne tient vraiment. La toute puissance du mot se recolore entre nos mains, nos bouches épris de cette préhistoire inextinguible. Je t'aime c'est comme de l'air qui entre dans ces poumons qui ont résisté à l'absence des jours. Banalité inexpugnable : nous ne le reconnaîtrons plus avant de nous être nous-mêmes d'abord reconnus. Rien ne vaut d'être vécu sans cet alcool de vie.